Calypso Maître du Jeu
Messages : 71 Date d'inscription : 18/07/2007 Localisation : Dans les profondeurs de l'océan ...
| Sujet: Introduction : Le journal du Capitaine Benjamin Strogan Mer 18 Juil - 2:26 | |
| Journal de bord du capitaine 01 juillet 1654
Nous voguons sur les Caraïbes depuis déjà six semaines maintenant. Nous sommes partis de l'Anse Rouge pour la Cayenne, les calles vides et les poches pleines de promesses. En ville, la canicule sévissait toujours, et le rhum se faisait rare. Mais peu leur importait le rhum puisque la nourriture se faisait rare aussi ; à cause des pirates, de moins en moins de marchandises se rendent à bon port. En fait, peu de navires se risquaient en haute mer, de peur de croiser un pavillon pirate. Ces rebus de la société, ces voleurs sans loi ni honneur! Par leur faute, le travail se fait de plus en plus discret. Nous n'avions pas été en mer depuis presque un mois, les provisions se faisant rares, ayant à peine de quoi nous nourrir sur place. Si cette pénurie continuait, nous n'avions guère espoir de trouver du travail, le peu de nourriture entraînant une petite crise économique. Rien de bien grave, mais il faut guetter une crise, car si elle ne passe pas, elle empire ... Toujours est-il que le rhum commençait aussi à manquer, les ouvriers et les marins ne trouvant autre chose pour occuper leur temps que de s'enivrer. Je ne suis pas mieux qu'eux, cela dit. Un capitaine, forcé de regarder son bateau moisir sur place pendant un mois, sans lever l'ancre ... il y a de quoi déprimer.
Mais la ville a réagit. Le gouverneur général ne pouvait probablement plus nier l'évidence. Il fallait traverser jusqu'à la Cayenne, sur l'île d'en face, le port de ravitaillement le plus sécuritaire. Nous aurions pu aller à Gonaïves, mais longer ainsi Haiti était dangereux, non seulement pour les pirates, mais aussi pour les récifs. Et un trajet en ligne droite coûtait beaucoup moins cher, même si celui-ci était plus long. Mais le risque était toujours présent : traverser la mer, infestée de pirates, cela relevait de la pure folie! Peu de marins, encore moins de capitaines, étaient prêts à y risquer leur peau, pour les premiers, et leur navire, pour les seconds. Mais, foi de Strogan, je n'allais pas rester accosté sur ce port plus longtemps! Plutôt risquer de perdre la vie que la raison! J'étais en train de devenir fou, à cause de la chaleur et de l'alcool, assis devant mon bateau, à regarder la mer se moquer de moi. J'aurais presque pu jurer l'entendre ricaner, d'un rire profond et grave, rocailleux comme les fonds marins. J'étais à deux doigts de croire à ces contes de bonne femme, à cette déesse de la mer, à cette Calypso.
Heureusement, l'offre du gouverneur général fut lancée, et bien que le danger était présent, presque inévitable, la récompense s'avérait prometteuse - six cents pièces d'or, plus le vingtième des cargaisons. De toute façon, la seule idée de quitter ce port poisseux m'aurait suffit.
J'ai réuni mon équipage, et nous fûment partis dans les trois jours suivants. Pour l'occasion, j'avais fait installer des vigies qui puissent assurer un relais continuel, histoire de bien se préparer en cas d'un éventuel assaut pirate. J'avais aussi des canons presque neufs, ce n'était pas du luxe. Les plus fébriles furent peut-être déçus, mais aucun pirate dans les environs. Je commence à croire qu'on s'est bien payé ma tête, en essayant de m'effrayer avec ces histoires de boucaniers.
Nous sommes en route pour le retour vers l'Anse Rouge, d'ici quelques jours à peine, nous serons à la ville, les calles remplies de ravitaillements, la promesse du gouverneur dans nos poches de marins aguerris. Je compte garder quelques bouteilles de rhum pour fêter la réussite de l'expédition.
Je sais qu'il est trop tôt pour crier victoire, mais j'ai peine à croire que les pirates puissent nous assaillir à ce point du voyage. Tout s'est déroulé sans le moindre accroc, comme si c'était un rêve. La température fut clémente, le vent favorable. Peut-être devrais-je remercier Calypso, au fond?
Bien sûr que non! Notre succès n'est dû qu'à notre dure labeur, à notre expérience de marin et à la chance. Je ne crois pas en ces balivernes, je n'y croirai sans doute jamais.
Cletus dit qu'il a vu un bateau dans la noirceur, hier, par delà le hublot, le pavillon tout aussi sombre orné d'une tache blanche. Il aurait juré que c'était là l'insigne des pirates, mais aucune trace du bateau le lendemain. Un bateau ne peut s'évaporer pendant la nuit! Cletus a toujours été un grand nerveux, de toute façon, et son penchant pour l'alcool ne l'aide pas à rester d'une bien grande lucidité.
Mais il reste que l'atmosphère était lourde, aujourd'hui. J'appréhende peut-être un peu ces derniers jours, moi aussi... | |
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